"Le J c'est le S", "En Y" ou "Mercééé": devenez incollable sur le vocabulaire de Jul, le phénomène rap marseillais

Phénoménal, comme le titre de son dernier single. En 2025, le rappeur marseillais Jul marche sur l'eau.

Après avoir pulvérisé la jauge du Stade de France le 26 avril 2025 (près de 98 000 spectateurs), Julien Mari (de son vrai nom) s'apprête à reproduire l'exploit en remplissant le stade Vélodrome deux fois d'affilée ce vendredi 23 et ce samedi 24 mai.

En 10 ans, le petit gars en claquettes chaussettes, très peu présent dans les médias, a su s'imposer comme un mastodonte de l'industrie musicale française, qu'il inonde (littéralement) de ses sons. A son compteur: 34 albums, quelque... 1000 titres et 200 certifications.

Adulé par les uns, le trentenaire qui se surnomme l'ovni reste pour les autres un objet sonore non identifié (voire décrié), au vocabulaire bien souvent obscur. Envie d'y voir plus clair dans les textes de ce phénomène de société? Voici un glossaire utile.

Expression. "Le, le J, c'est le S (ok), hum, j'sors le RS (vroum, vroum)" (Bande organisée, 2020)

Le J, c'est LE surnom du rappeur Jul, de son vrai nom Julien Mari. Pour la simple et bonne raison que... c'est l'initiale de son prénom. Quant au S, il abrège là le mot "sang", popularisé par Jul pour décrire des liens d'amitiés très forts, voire familiaux ("Tu es le sang" ou "c'est le sang de la veine"). L'expression se traduit donc par "Le Jul, c'est le sang" et veut dire que le rappeur est une sorte de membre de la famille.

Expression. "KX en Y, T-Max en Y, P'tit Stunt en Y, Runner en Y" (En Y, 2015)

L'expression "en Y" désigne une figure reproduisant la forme de la lettre de l'alphabet. Elle consiste à faire basculer son deux-roues en équilibre sur la roue arrière tout en levant les bras. Qu'il s'agisse d'un scooter sportif T-Max, d'une moto de cross KX, d'un scooter Stunt ou Runner... Qu'importe la monture pourvu qu'on ait la figure. Par extension, l'expression "en Y", décrit aussi le fait de maîtriser quelque chose, de dominer une situation, un secteur...

Nom masculin. "Appelle moi l’ovni, la lettre ou le J" (Bow, 2018)

On ne vous apprend rien. Il s'agit du sigle "objet volant non identifié" qui décrit aussi "un personnage, un auteur, une œuvre inattendue, inclassable", selon le dictionnaire Le Robert. Dans le langage Jul, il désigne le rappeur lui-même, qui utilise d'ailleurs un dessin d'extraterrestre (assez naïf) sur ces tee-shirts, médaillon et autres goodies.

Nom masculin. "Pour la team Jul, on dit quoi ? Et mercé!" (Wouaw, 2025)

Le terme est une version du mot "merci", prononcé avec un accent. Selon Le Parisien, c'est notamment le footballeur marseillais Benjamin Mendy, ami du rappeur, qui a popularisé cette prononciation. Jul utilise "mercé" dans de nombreux titres et a même développé, avec sa marque de vêtements D'or et de platine, un tee-shirt "Et mercé la zone", rendant hommage à sa communauté de fans

Nom féminin. "Alors la zone, ça dit quoi? C'est l'été, tous les jours, c'est samedi soir" (Alors la zone, 2021)

A la base, le mot est utilisé pour décrire le quartier, la cité, le QG, l'endroit d'où l'on vient et auquel on est lié par un fort sentiment d'appartenance. Par extension, Jul l'utilise aussi pour décrire ses fans de la première heure, son crew, sa communauté.

Nom féminin. "Elle a l'regard qui tue Tchikita. Cheveux longs comme Nikita" (Tchikita, 2016)

En espagnol, le mot "chiquita" désigne une petite fille. Dans le langage Jul, il désigne sa compagne. Inconnue du grand public, celle qu'il a remerciée en conclusion de son concert au stade de France partagerait sa vie depuis de longues années, avant même qu'il ne soit célèbre. Le rappeur y fait très souvent référence dans ses titres.

Nom féminin - "Que du Ju-Jul dans la vago" (Asalto, 2018)

Mot d'argot, employé notamment dans la culture manouche, "vago" signifie voiture. Le terme est fréquemment employé par des rappeurs, dont Jul, qui l'utilisent également en version verlan "gova". L'appellation "gamos", également coutumière des sons hip-hop, désigne quant à elle une automobile haut de gamme.

Nom propre. "Plus besoin d’aller chez Lacoste, depuis qu’j’suis D’or et de platine" (Bande organisée, 2020)

D'or et de platine est le nom du label indépendant créé par le rappeur marseillais dès 2015, année où il claque la porte de Liga One Industry à la suite de désaccords financiers. Abrégée D&P, l'appellation se retrouve sur de nombreux articles de merchandising développés par Jul pour ses fans: survêtements, maillots, claquettes, chaussettes... Son dernier album, sorti le 25 avril 2025, s'appelle ainsi D&P à vie. Le 8 mai 2024, alors qu'il surprenait en relayeur surprise de la flamme olympique à Marseille, Jul avait ainsi été raillé par des internautes arguant qu'il ne connaissait pas la médaille de bronze après qu'il ait déclaré souhaiter "à tous ces athlètes des médailles de bronze, d’argent, d’or et… de platine!". Raté: il s'agissait là juste d'une private joke du J pour sa communauté.

Expression. "Y a trop de boco, j'vais changer de numéro. Le jeune, il est fou, il te chasse après l'apéro" (Après l’apéro, 2025)

Boco fait écho au mot "bouche". Par extension, "avoir la boco" signifie donc utiliser un peu trop sa bouche, c'est-à-dire ne pas tenir sa langue, parler un peu trop, et donc ne pas être une personne digne de confiance.

Nom féminin. "La vie est faite comme ça. Visière fumée sur la Honda. J'suis pas le prince de la ville. Mais j'trahis pas la Honda" (La vie est faite comme ça)

La Honda, normalement orthographié "Onda", fait référence au nom d'un gang dans le thriller "Les Princes de la ville", film américain réalisé par Taylor Hackford et sorti en 1993. Par extension, il est utilisé par Jul pour désigner la famille, les gens de confiance de son entourage auxquels il est lié par un pacte de valeurs communes.

Adjectif. "Hier, je souriais; aujourd’hui, je pleure; là, j’suis quillé" (Comment ça va se finir, 2020)

Quillé est une appellation familière signifiant ivre, saoul.

Nom. "J'fais mes bails, laissez-moi là, laissez-moi là…" (J’fais mes bails, 2018)

Très employé par la jeune génération, le terme a plusieurs nuances de sens. Avoir un bail peut d'abord faire écho à une histoire amoureuse, un flirt. A noter qu'on peut également l'employé pour décrire son flirt sous la forme "c'est mon bail". "Faire ses bails" peut se traduire par vivre sa vie, ses histoires, se faire ses plans.

Acronyme. "Ti as fait le BDG. Tu t'es fait piéger. Elle t'a fléché" (BDG, 2019) Âmes sensibles s'abstenir. BDG, acronyme popularisé par Jul, signifie "bandeur de gadji", c'est-à-dire un serial séducteur de femmes ("gadji" étant un terme utilisé par les Tsiganes pour désigner une fille ou une femme non gitane). Pendant féminin, BDH est l'abréviation de "bandeuse d'homme" (aussi appelée "pick-me") et désigne une fille prête à écraser la concurrence féminine pour attirer l'attention des hommes. Il s'agit là d'une insulte très utilisée chez les ados pour salir la réputation. A noter que ce dernier sens est plutôt une interprétation faite par les jeunes.

Dans l'univers Jul, BDH au masculin, bandeur d'homme, désigne aussi une personne si admirative d'un homme qu'elle est prête à tout pour se faire remarquer par lui quitte à friser le ridicule, écraser les autres ou trahir ses amis.

Expression. "C’est toi qui as la haine, pourquoi tu fais des poussettes aux autres?" (J’ai tout su, 2022)

Très utilisée par Jul, l'expression "faire des poussettes" signifie venir au contact de son adversaire pour tenter physiquement de le déstabiliser, le chercher en somme, de manière peu justifiée, avec hargne.